[2024-11-19] (Accès libre) Il est rare que le SNITEM manifeste autant de colère dans un communiqué de presse, publié le 19 novembre 2024, mais il est vrai que l’annonce surprise faite par le gouvernement, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, a de quoi susciter la révolte.
Qu’est-ce que la « clause de sauvegarde » ?
Pour comprendre de quoi il sagit, clarifions au préalable le mécanisme de la « clause de sauvegarde » institué en 1999. Il concerne les entreprises pharmaceutiques et les fabricants de dispositifs médicaux.
Pour les entreprises pharmaceutiques, le fonctionnement est expliqué très simplement en moins de 2 minutes dans cette vidéo du site « Les Entreprises du Médicament » (LEEM) : en cas de dépassement des dépenses de médicaments par rapport aux prévisions, les entreprises pharmaceutiques reversent à l’État 70 % du montant de ce dépassement, à partir d’un seuil défini par avance (désigné par « montant M » dans le texte juridique), afin que les français puissent continuer à se soigner sans mettre la sécurité sociale en faillite.
Le même principe a été appliqué aux entreprises du secteur médical, à partir d’un seuil appelé « montant Z » dans le texte de loi, ce qui peut déjà paraître surprenant en soi, dans la mesure où la consommation de dispositifs médicaux est directement liée aux actes médicaux, sur lesquels les fabricants ont très peu d’influence.
L’annonce surprise du gouvernement
Or, après avoir fixé ce seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde à 2,31 milliards d’euros (pour les dispositifs médicaux) dans l’article 28 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, et 2,27 milliards d’euros dans l’article 9 du PLFSS pour 2025, le gouvernement annonce brutalement, sans consultation préalable, qu’il prévoit de baisser le seuil, pour 2024, à 2,26 milliards d’euros au lieu de 2,31, avec effet rétroactif sur l’année 2024, via un amendement de dernière minute qui serait ajouté au PLFSS pour 2025. Cela revient à instituer une taxe surprise de 200 millions d’euros pour les entreprises concernées, à moins de 2 mois de la fin de l’année, alors que le secteur est constitué à plus de 90 % de PME et TPE, lesquelles se trouvent déjà largement fragilisées par le passage aux nouveaux règlements européens.
L’APIDIM (Association pour la Promotion de l’Innovation des Dispositifs Médicaux) a, elle aussi, réagi par un communiqué de presse le 25 novembre 2024.
Une opération similaire serait appliquée au secteur pharmaceutique, ce qui n’a pas manqué de susciter une très vive réaction du LEEM via un communiqué de presse incendiaire publié le 18 novembre 2024.
Dernier espoir : un rejet du Parlement ou du Sénat ?
Le SNITEM ainsi que l’APIDIM en appellent au Parlement (via la Commission Mixte Paritaire) pour rejeter l’amendement proposé, tandis que le LEEM avait fait la même demande au Sénat. Espérons que des voix raisonnables feront pencher la balance du bon côté avant que la loi ne soit adoptée.
Opinion personnelle : on ne peut pas d’une part annoncer haut et fort que l’on veut rétablir notre souveraineté nationale, et d’autre part prendre des mesures à court terme qui vont à l’encontre même de ces annonces. Il n’y a rien de tel pour ruiner la confiance que l’on peut avoir dans les élites qui nous gouvernent.
Article rédigé par Denys Durand-Viel, Président de DM Experts SAS