RDM : la Commission européenne au pied du mur pour éviter une crise sanitaire majeure

[2022-11-18] (Accès libre) Le SNITEM (Syndicat National des Industries des Technologies Médicales) a organisé le 18 novembre 2022 un colloque gratuit à l’Institut Pasteur à Paris, retransmis en direct (voir notre annonce précédente), dont le titre était :

« RDM, sortir de l’impasse de la transition »

Le Snitem a mis en ligne l’enregistrement des différentes interventions, que vous pouvez visionner grâce à ce lien. Il a également publié le 21 novembre 2022 un article intitulé :

« Règlement européen DM : l’urgence d’une solution européenne harmonisée pour sortir de l’impasse« 

En introduction du colloque du 18 novembre, Lucile Blaise et Cécile Vaugelade (SNITEM) ont fait un bilan de l’évolution de la situation depuis l’an dernier, et le constat dans la mise en œuvre du règlement (UE) 2017/745 (RDM) est plus qu’alarmant.

Monsieur Jacques Caton, chirurgien orthopédiste et membre de l’Académie de Médecine, a confirmé que le risque de pénurie était clairement identifié, et que cette pénurie risquait de mettre des patients en danger.

Plusieurs industriels (Vygon, Peters Surgical, Maco-Pharma, Intrasense) ont témoigné des obstacles auxquels ils sont confrontés :

  • dispositifs qui ne peuvent plus être commercialisés (certificats CE arrivés à expiration),
  • réduction de 30 % de la gamme des dispositifs,
  • surinvestissement dans les affaires réglementaires, au détriment de la R&D et de l’industrialisation,
  • dossiers déposés auprès des organismes notifiés, qui figent l’innovation pendant plus d’un an jusqu’à l’obtention du marquage CE.

À les entendre, nous risquons une crise sanitaire majeure si des mesures d’urgence ne sont pas prises à l’échelle européenne.

En réponse, Madame Christelle Ratignier Carbonneil, Directrice Générale de l’ANSM, a confirmé qu’il fallait trouver des solutions européennes pour que les patients disposent de dispositifs médicaux sûrs et qu’ils accèdent à l’innovation. Ces solutions sont en cours de discussion. Elle a confirmé qu’il était nécessaire de donner de la visibilité aux industriels, et a affirmé : « Nous ne laisserons pas les industriels au bord de la route ».

Madame Hélène Monasse, sous-directrice de la politique des produits de santé et de la qualité des pratiques et des soins à la Direction générale de la Santé Publique (DGS), a rappelé de son côté que pour modifier le RDM, c’était la Commission européenne qui avait la main pour faire des propositions, mais que celles-ci devront ensuite faire l’objet d’un consensus. Elle a confirmé qu’il n’y aurait pas de report de dates du RDM, et que la « période de grâce » (mal nommée) était en réalité un délai accordé pour se mettre en conformité. Elle a enfin rappelé qu’il était nécessaire d’anticiper pour déposer des dossiers (conformes) le plus tôt possible.

Les interventions suivantes d’Edgar Franke, Secrétaire d’état, Ministre de la Santé en Allemagne et de Marc-Pierre Möll, Président de BVMed n’ont fait que confirmer que la situation n’était pas meilleure en Allemagne, en dépit d’un plus grand nombre d’organismes notifiés selon le RDM. Des propositions ont été émises récemment par le MDCG et transmises à la Commission, mais du côté des fabricants (30 000 PME en Allemagne), les décisions de sabrer dans les gammes de produits ont déjà été prises.

Madame Anna Lefevre Skjöldebrand, Présidente de Swedish Medtech en Suède a également insisté sur l’augmentation spectaculaire des coûts pour l’obtention du nouveau marquage CE selon le RDM (parfois inaccessible pour des PME), et le fait que le marché européen était devenu trop imprévisible pour les entreprises, qui préfèrent se tourner désormais vers le marché américain.

Monsieur Merlin Rietschel, de MedTech Europe, est intervenu en dernier pour indiquer qu’il y avait un besoin urgent de solutions aujourd’hui, car il a rappelé les résultats de l’enquête publiée en juillet 2022 (voir notre article) :

  • le temps de certification a doublé : pour les fabricants qui n’ont pas encore déposé leur dossier, il est déjà trop tard (le délai pour l’obtention du marquage CE, de 13 à 18 mois en moyenne, peut atteindre 24 mois) ;
  • seulement 15 % des certificats selon le RDM avaient été émis en juillet 2022 ;
  • les TPE souffrent le plus, un tiers d’entre elles n’ont pas accès à un organisme notifié ;
  • le marché européen n’est plus attractif, l’innovation se tourne vers d’autres marchés (USA, Chine…).

Toutes les parties prenantes attendent désormais la réunion de l’EPSCO du 9 décembre 2022 (qui rassemblera les Ministres de la Santé européens) au cours de laquelle la Commission européenne doit faire des propositions. Mais si ces propositions sont de nature législative (ce que tout le monde espère), elles devront encore passer par le circuit d’approbation du Parlement européen, puis du Conseil, ce qui prendra nécessairement plusieurs mois avant qu’une mesure concrète ne voie le jour. Espérons que la Suède, prenant la présidence du Conseil de l’Union européenne au 1er janvier 2023, parviendra à accélérer le processus, afin d’éviter une nouvelle crise sanitaire déclenchée par un règlement dont l’objectif est d’améliorer la sécurité et l’efficacité des dispositifs médicaux, ce qui serait le comble de l’absurde.

Article rédigé par Denys Durand-Viel, Président de DM Experts SAS

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